Président sortant, Macky Sall quête un second mandat avec des handicaps gênants et des atouts certains. Il aura certes manqué à certains de ses engagements, mais réussi à s’offrir un bilan non négligeable et à confiner l’adversité à sa plus simple expression.
Dur au mal
La classe politique a pris Macky Sall à la figure. À juste 58 ans, alors qu’au départ presque personne ne misait sur lui, le candidat de Benno bokk yaakaar pour la présidentielle du 24 février a déjà fait le tour de la question. Directeur général, plusieurs fois ministre, maire, Premier ministre, président de l’Assemblée nationale puis président de la République, l’ultime objectif d’un homme politique qui se respecte. Le graal.
Il y a aussi la manière. Il a franchi les obstacles un à un, sans se prendre les haies qui, pourtant à certains endroits, paraissaient des montagnes infranchissables.
Ses déboires avec Wade, tout puissant chef de l’État : il encaisse le coup, rend ses mandats estampillés Pds, rompt les amarres et engage la traversée du désert avec pour seul bagage, sa dignité.
La conquête du pouvoir avec un parti qui venait à peine de sortir de son œuf : il s’éloigne du confort dakarois, visite et revisite le Sénégal des profondeurs, et frappe au bon endroit au bon moment.
Tacticien
Arrivé au pouvoir, Macky Sall ne se fait pas d’illusion. Il comprend et accepte très vite qu’il a beau être capé, pour avoir occupé différentes stations stratégiques dans l’appareil d’État, il lui faut l’appui d’hommes d’État expérimenté et dotés d’un solide bagout politique. Là aussi, il dribble les pronostics.
Non seulement, il réussit à enrôler les dinosaures de l’époque, mais en plus, il réalise la prouesse de placer à la même table deux ennemis jurés : Moustapha Niasse et Ousmane Tanor Dieng, respectivement président de l’Assemblée nationale et président du Haut conseil des collectivités territoriales.
Ce n’est pas tout. Confronté à ses promesses électorales, dont la plus attendue était la réduction de son mandat de 7 ans à 5 ans, et ses prises de position radicales, notamment à propos de la transhumance et de l’implication de sa famille dans la gestion de l’État (« La patrie avant le parti »), Macky Sall est à la manœuvre. Il met la pédale douce ici (traque des biens mal acquis), freine des quatre fers là (conclusions des Assises) et ignore « son » code de la route ailleurs (les siens aux affaires, recrutement de transhumants).
Bourreau de l’opposition
Et pour boucler la boucle, le président de l’Apr anéantit l’opposition. À la loyale, selon ses partisans. En donnant des coups au-dessous de la ceinture, pour ses détracteurs. Khalifa Sall et Karim Wade, ses adversaires réputés les plus coriaces, sont rattrapés par la justice. Conséquence : ils sont écartés de la présidentielle du 24 février 2019. Une vingtaine d’autres opposants passent également à la trappe, à la faveur du parrainage institué contre vents et marrées.
À l’arrivée Macky Sall quête un second mandat avec face à lui seulement quatre candidats. Et pas forcément les plus coriaces de l’arène politique. En effet en dehors d’Idrissa Seck, tous ses adversaires participent pour la première fois à une présidentielle.
Ce paramètre n’est peut-être pas un baromètre fiable. Les conditions de son accession au pouvoir le prouvent. Seulement il a remporté la course pour le Palais à sa première tentative, alors qu’il avait un plus par rapport à Madické Niang, Ousmane Sonko et Issa Sall qui sont en 2019 dans la situation que lui en 2012 : un parcours politique et institutionnel qui lui conférait une expérience avérée en matière d’élection.
Accusé d’instrumentaliser la justice à des fins politiciennes, de restreindre les libertés individuelles et collectives, d’avoir tripatouillé le fichier électoral, de « sponsoriser » des opposants fictifs et de ne pas avoir réussi à améliorer la vie des Sénégalais, malgré des indicateurs macro-économique positifs, Macky Sall brigue un second mandat avec un passif chargé. Cependant, il peut se targuer d’avoir un bilan non négligeable : infrastructures, Cmu, bourses de sécurité familiale, baisse des prix du loyer…
« Sénégalais de synthèse »
Macky Sall se définit comme « un Sénégalais de synthèse, un pulaar de culture sérère ». Fier de ses origines que Wade a cherché à souiller au fond des caniveaux de l’esclavage et de l’anthropophagie. « Je suis issu d’une lignée de guerriers. Il faut aller au Fouta pour le savoir », a lancé le chef de l’État lors de la présentation de son livre, Le Sénégal au cœur.
Macky Sall est entré en politique en prenant la carte d’Aj/Pads. Il était étudiant à l’université de Dakar (actuel Ucad). Mais très vite il quitte le parti d’obédience marxiste-léniniste pour se jeter dans les bras de Wade et le Pds.
Formé à l’Institut des sciences de la terre (Ist) de Dakar et diplômé de l’École nationale supérieure du pétrole et des moteurs (Enspm) de l’Institut français du pétrole (Ifp) de Paris, le candidat de Benno devient ingénieur géologue puis géophysicien, membre de plusieurs associations nationales et internationales d’experts de la profession.
Marié à Marème Faye, Macky Sall est père de deux garçons et d’une fille. Il est né le 11 décembre 1961 à Fatick. La ville dont il fut le maire pour la première fois en 2009 et où il ira voter le 24 février pour obtenir un second mandat. Il a face à lui Idrissa Seck (Rewmi), Madické Niang (Madické 2019), Ousmane Sonko (Pastef) et El Hadj Issa Sall (Pur).
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