Le Sénégal doit se souvenir du Président Mamadou Dia, l’homme des ruptures et le patriote grâce à qui, l’intégrité du territoire de la colonie est restée intacte. Après avoir cosigné les accords d’indépendance avec Modibo Keïta, il a fait face au diktat des Soudanais, entrainant la fin de la Fédération. Après cet épisode douloureux, il s’est consacré corps et âme à la construction d’une jeune nation de 1958 à 1962 dont la population avait souffert des vexations et brimades de toutes sortes des colonialistes.
Il s’est battu pour garder la presqu’ile du Cap-Vert, aujourd’hui la région de Dakar, dans le territoire sénégalais. Sur la base d’études scientifiques et d’analyses fouillées, une stratégie de développement à long terme en vue d’édifier une économie endogène et résiliente fut élaborée. Il disait bien que l’indépendance politique ne peut avoir de sens sans une indépendance économique. Il avait l’ambition de diversifier notre partenariat avec tous les pays respectueux de notre souveraineté et réduire à son strict minimum l’assistance technique française et fermer toutes les bases militaires. Il avait négocié des accords monétaires, dans un esprit intégrateur, qui devaient même ramener la Guinée et maintenir la Mauritanie dans notre zone monétaire. Il a défendu l’adhésion du Sénégal aux Nations unies, du fait que le siège de la fédération du Mali était occupé par les Soudanais. Il a bâti nos structures administratives post indépendance et avait créé sept régions administratives fondées sur leurs potentialités économiques. Il a surtout défait l’économie de traite en vue de restituer au paysan la plénitude de sa décision d’action par la mise en place de coopératives qui devaient évoluer vers un statut de société à responsabilité limitée avec l’animation comme moyen de conscientisation de sa condition d’exploitée. Ce combat, il l’avait mené contre la bourgeoisie bureaucratie-parlementaire affairiste alliée à la France coloniale bénéficiant du soutien d’une classe politico-religieuse qui ne cessait de sucer le monde paysan avec l’appui de chefs traditionnels ou de canton se donnant toutes les libertés qu’il a fini par supprimer.
Il était convaincu que l’industrialisation devait passer par un encadrement technologique et une formation alliant théorie et pratique de nos artisans dans le souci aussi de créer une économie rurale forte contribuant à une osmose ville-campagne. Mais déjà son souci d’indépendance économique l’a conduit à créer la Société africaine de raffinage et d’orienter la grande industrie vers la transformation de nos ressources locales. Il avait débuté une réforme de l’enseignement au service de l’économie. La priorité étant le monde rural, il a créé l’Ecole nationale d’économie appliquée et des écoles d’agents techniques d’agriculture ou d’élevage récupérant les élèves de CM2 non reçus à l’entrée en sixième. Ces écoles devaient mailler le territoire national. Pour une administration efficace, il avait créé des écoles destinées à répondre aux besoins de l’Etat. Il voulait accélérer la scolarisation en atteignant un taux de 50 % de scolarisés à la fin de l’année 1964, année terminale du Premier plan, car pour lui, l’analphabétisme était le plus grand ennemi d’une nation.
Il a, en peu de temps, changé le visage de la ville de Dakar et mis en place un programme d’habitat social avec une perspective de donner le toit facile aux Sénégalais. Avec l’OHLM, il a fait construire des logements presque dans toutes les grandes communes du Sénégal, au nombre de 33 à l’indépendance. Avec la SICAP il a réalisé les lots de Liberté 1, 2, 3 et les logements des allées du Centenaire. Il a engagé la construction de la grande mosquée de Dakar. Il voulait faire de la Ville de Thiès une ville test, modèle à répliquer partout dans le pays avec des plans directeurs urbains bien réfléchis.
Il était respectueux de manière intransi- geante des biens et deniers publics justifiant d’ailleurs son absence de patrimoine. En effet à son arrestation, lui l’ordonnateur du budget national n’avait même pas une maison pour sa famille.
«Le Groupe de la Corbeille du Président DIA»