Le président de la République déroule son opération de charme pour le financement des projets du plan d’actions prioritaires 2019-2023, phase 2 du Plan Sénégal émergent (Pse). A l’occasion du Forum des investisseurs du Sénégal tenu hier, mardi 18 décembre, à Paris, Macky Sall a invité les quelques 853 investisseurs présents à venir investir dans les secteurs tels que la santé pour le relèvement du plateau médical, l’éducation et le tourisme pour des infrastructures (hôtels) accueillantes. Non sans annoncer le transfert d’une quinzaine de ministères, en dehors, bien évidemment, des ministères de souveraineté, à partir de la fin de ce mois.

EN MATIERE D’HOTELLERIE, NOUS AVONS DE GROS BESOINS

«Pour le secteur tourisme, aucun hôtel de type 5 étoiles qui soit opérationnel à Dakar. L’ambition d’émergence est de présenter ces différents aspects dans un pays. Il faut un cadre attrayant pour tout type d’investisseurs. En matière d’hôtellerie, nous avons de gros besoins. En Casamance, j’ai lancé depuis 2 ans une zone prioritaire qui exonère de l’impôt, de taxes pour la relance du tourisme dans cette zone.

SANTE ET EDUCATION : IL FAUT QU’IL AIT DES REFORMES POUR ALLER VERS LE PRIVE

Dans le domaine de la santé privée, on a besoin d’hôpitaux privés qui soient pleinement outillés. Je salue les efforts du Fonsis qui a amorcé des hôpitaux publics en mettant des sections de laboratoires d’analyse, de radiologie, afin d’éviter le nombre d’évacuations sanitaires. Nous avons une ressource humaine de qualité, notamment de bons médecins, d’excellents professeurs. C’est l’environnement qui reste. C’est le privé qui peut apporter cette touche. Nous allons poursuivre les efforts pour les hôpitaux publics, mais il faudra des réformes sur la santé et l’éducation. On met énormément de ressources dans ces deux secteurs toujours instables. Il faut qu’il ait des réformes pour aller vers le privé. Pour l’enseignement supérieur, il faut se réjouir du développement fulgurant des universités privées. Il faut que dans la médecine, audelà des cliniques lesquelles je félicite les promoteurs, qu’il ait des plateaux plus complets.

LES OPERATEURS DOIVENT NOUS AIDER A BAISSER LE PRIX DE L’INTERNET AU SENEGAL

L’économie numérique est un secteur essentiel pour l’avenir. Nous avions commencé à lancer les fournisseurs d’accès à l’internet (FAI). Ce qui est encore très cher. Il faut que les opérateurs nous aident à baisser le prix de l’internet au Sénégal. L’accès doit être plus libre pour développer l’économie numérique. L’Artp devra travailler avec les opérateurs pour que l’accès soit libre. J’ai décidé de signer un décret pour enlever la taxe qui leur était demandée. Ce sont des redevances de 200 millions par an. Il faut que Orange et la Sonatel laissent un peu d’espace.

NOUS ALLONS TRAVAILLER AVEC LE SECTEUR NATIONAL ET INTERNATIONAL POUR QUE CET ENVIRONNEMENT PARAPETROLIER PUISSE ETRE PROPICE.

Il y a tous les services liés à l’industrie du pétrole et du gaz. C’est dans la perspective de l’exploitation du gisement GTA (Grande tortue Ahmeyim) au nord, entre le Sénégal et la Mauritanie. Dès ce vendredi, nous allons signer l’ensemble des textes des autorisations d’exploitation. Nous allons déclarer le final investment decision pour le gaz. Pour SNE Sangomar, nous allons travailler. Nous sommes dans une perspective Gaz to power pour l’électricité. A ce niveau, nous travaillons pour que, dès 2023, que le first gaz obtenu de SNE puisse alimenter les centrales de Senelec et, au besoin, d’autres centrales privées. Plus de 180 milliards FCfa pour subventionner la Senelec. C’est énorme. Donc, il faudra une diversification. Je salue les résultats du mix-énergétique. Si nous arrivons à avoir le gaz, le coût moyen, selon les évaluations, sera autour de 35FCfa. Nous n’aurons plus à subventionner notre ami Mactar Cissé. C’est lui qui va verser des dividendes à l’Etat. Pour les services liés à l’exploration du gaz et du pétrole, j’ai dû arrêter une manifestation d’intérêt que le Port autonome de Dakar avait lancée, le temps de finaliser la loi sur le contenu local. Cette loi sera votée en début janvier, tout comme la loi sur la gestion future des revenus pétroliers et gaziers. On saura la partie qui reviendra aux nationaux. Nous allons travailler avec le secteur national et international pour que cet environnement parapétrolier puisse être propice.

NOUS ALLONS TRANSFERER UNE QUINZAINE DE MINISTERES A PARTIR DE LA FIN DE CE MOIS.

Pour revenir sur le pôle urbain de Diamniadio, la ville du futur, nous allons transférer une quinzaine de ministères à partir de la fin de ce mois. Nous avons déjà tout le pôle du secteur primaire qui est là-bas. Nous avons les ministères de l’Agriculture, de l’Elevage, de la Pêche. L’éducation nationale va aussi rejoindre. En dehors, bien évidemment, des ministères de souveraineté, tous les autres départements iront à Diamniadio. Vous avez le transport, notamment le TER, l’autoroute à péage et la question de la connectivité sont réglés. La maison des Nations Unies sera làbas pour un regroupement optimal des agences de l’institution.

PROLONGEMENT DU TER JUSQU’A MBOUR ET THIES

Plus tard, j’ai l’ambition de faire évoluer le TER, au-delà de l’aéroport jusqu’à Mbour pour la Petite côte et à Thiès. Il doit être possible de prolonger le TER. On verra avec nos capacités économiques. Ensuite, nous avons l’aménagement du parc industriel et du parc technologique, des plateformes logistiques des zones économiques spéciales.

JOJ 2022 : HEBERGEMENT DES ATHLETES A L’UNIVERSITE AMADOU MAKHTAR MBOW

Nous allons accueillir en 2022 les JOJ. Ce qui va nécessiter des efforts dans l’aménagement urbain, la propreté de la ville et le désencombrement. Dakar est un vaste marché de vente de véhicules. Ce n’est pas possible. Il faut qu’avec les maires que l’on s’accorde sur un minimum. On ne peut pas accueillir le monde entier dans ce désordre. Il faudra renforcer les capacités d’accueil et d’hébergement. Nous avons convenu de renforcer à travers l’université Amadou Makhtar Mbow pour héberger les athlètes et revenir aux étudiants pour le logement. C’est la formule faite par l’Argentine.

MISE EN ŒUVRE DES PROJETS Macky en mode fast track

Soutenant que le Plan d’actions prioritaires (PAP 2) est une accélération des initiatives pour tendre vers la croissance, et que les projets seront exécutés à bonne date, avec efficacité, efficience et transparence, Macky Sall veut inscrire les travaux engagés par son gouvernement et le secteur privé dans un mode « fast track »

« L’Afrique n’a pas de temps à perdre aujourd’hui. On est obligé de travailler. Les chantiers doivent être bouclés pour au maximum sur deux ans. Il faut que les gens s’adaptent dans cette phase. Il faut que toutes les entreprises privées en particulier puisent se mettre dans ce registre. Ce qui nous a permis d’ailleurs de faire ce qu’on a fait jusque-là », soutient le président devant 853 investisseurs. Non sans indiquer : « ceux qui ne peuvent pas faire fast track peuvent s’abstenir le temps que d’autres arrivent ». Pour donner un exemple des lenteurs de l’administration publique sénégalaise, frein à l’avancée des réformes, Macky cite les chantiers de l’université Amadou Makhtar Mbow de Dakar. « J’ai une université et cela fait quatre ans qu’elle est là-bas en chantier ouvert. Ce n’est pas normal. Nous allons travailler ensemble dans la confiance mais avec des délais. C’est absolument des choses qui ne seront pas négociables…Nous voulons avancer en rythme accéléré en évitant des pertes de temps indu », dit-il. Pour corriger ces lenteurs administratives, Macky mise sur la réforme de l’administration publique, avec la dématérialisation des procédures. « C’est vrai que les délais ont été réduits mais il reste encore qu’il y a des difficultés », reconnaît-il. Avant d’ajouter : « vous avez un projet, il tient la route. Vous avez les papiers, vous devez avoir votre autorisation dans les meilleurs délais »

CIMENTERIE : Macky Sall «supprime» les exonérations

A l’occasion du forum des investisseurs au Sénégal, le président de la République a fait savoir que « les cimentiers doivent accepter de payer les taxes ». Selon lui, « un Etat vit de taxes. On ne peut pas voir un secteur commercial aussi fort et important que le secteur du ciment qui ne paie pas d’impôts sur son activité. ». En parlant ainsi Macky Sall relance le débat sur l’exonération fiscale accordée aux cimenteries installées au Sénégal. « C’est une activité industrielle. Au-delà du Code minier, il faut quand même que nos amis acceptent de payer les taxes. Il faut aussi qu’on se parle franchement », a relevé le président, non sans signaler que « l’Etat a des engagements très forts pour l’emploi des jeunes, la sécurité. Il faut donc que les activités économiques paient les impôts là où les richesses sont créées. C’est valable pour le pétrole, le gaz, les mines ».

7356 MILLIARDS FCFA POUR LE PAP2 700 projets pour une croissance de 9,1%

Le ministre de l’Economie, des Finances et du Plan a fait savoir que les 7356 milliards FCfa annoncés dans le cadre du Groupe consultatif serviront à financer 700 projets pour une croissance de 9,1%, sur la période 2018- 2023. L’Etat compte engager des chantiers pour la poursuite de la réforme du système éducatif, de l’administration générale et de celle fiscale. « Il nous faut donc plus une administration de développement qu’une administration de commandement», soutient Macky devant les Ptf.

REACTIONS…REACTIONS…

KHOUDIA MBAYE, MINISTRE DE LA PROMOTION DES INVESTISSEMENTS « Toutes les attentes du PSE doivent être portées par une administration moderne »

Nous sommes arrivés au bout avec une évaluation positive sanctionnée par un engagement encore des bailleurs. C’est un succès. Nous attendons une implication plus forte du secteur privé national et étranger dans le deuxième plan d’actions prioritaires. Le chantier de la dématérialisation est un chantier important. La modernisation de l’administration est un élément important. Toutes les attentes du PSE doivent être portées par une administration transformée, moderne, connectée et articulée aux usagers. Nous avons un certain nombre de réformes dans ce secteur avec beaucoup de procédures déjà dématérialisées. Mais, nous sommes confrontés à la question de l’appropriation de ces nouveaux outils, à la question du changement de comportement. Nous devrons mettre l’accent sur la formation pour la conduite aux changements. Un autre chantier est l’adaptation du cadre législatif. Nous avons à finaliser le cadre juridique du partenariat public-privé. Sans oublier le chantier de toujours, celui de l’amélioration de l’attractivité du climat des affaires au Sénégal. Malgré les bonnes notes que nous engrangeons, nous pensons qu’il faut que nous fassions mieux. Que nous hissions parmi les meilleurs.

DOUDOU KA, DG FONGIP « Le Fongip est un élément important du dispositif de cette 2ème phase »

C’est de la satisfaction. Je me réjouis de cette confiance renouvelée du secteur privé à accompagner cette vision du président sur la croissance. Nous sommes dans une seconde phase où le secteur privé doit jouer un rôle pour une croissance durable. Cette deuxième phase est la mise en échelle. Nous avons lancé récemment le processus de mutation institutionnelle du Fongip. C’est jusque-là une agence publique nationale. Le Fongip va désormais devenir un établissement financier sous-regional, avec une capacité de financement qui sera multipliée par 5. Aujourd’hui, nous avons pu injecter 48 milliards FCfa dans l’économie nationale à l’occasion de la mise en œuvre de la première phase du Fonds. Dans cette deuxième phase, nous sommes en train de monter un projet important avec l’Adpme et l’ensemble des banques locales pour mobiliser 1000 à 1500 milliards en faveur des PME. Nous le ferons avec le Fonsis pour mobiliser un financement privé pour cette deuxième phase. C’est un défi à relever en se transformant d’abord en un établissement financier de garantie de cautionnement. Nous allons l’entamer dès le début de l’année 2019 pour terminer ce processus à la fin de l’année, avant de procéder à la mise en œuvre du fonds de garantie. Il s‘agit de porter la croissance par les investissements privés. Ce sont les entreprises qui peuvent le faire. D’où la place prépondérante d’un fonds de garantie des investissements prioritaires. Le Fongip est un élément important du dispositif de cette 2ème phase

CHRISTOPHE BIGOT, AMBASSADEUR DE FRANCE AU SÉNÉGAL

C’est un grand succès. Le Sénégal demandait 5 milliards de dollars et en a obtenu 14 milliards. C’est la marque de confiance de l’économie sénégalaise dans la stabilité, la prospérité, la sécurité. Les résultats de la première phase du PSE en termes de croissance, d’environnement des affaires, démontrent que c’est un très bon choix de venir investir au Sénégal.

MANSOUR KAMA, PRESIDENT DE LA CNES « Il faudra donc que nous assurions la réponse la plus appropriée pour les 5 années à venir »

C’est toujours bien que les grandes institutions de financement fassent confiance au Sénégal à travers le Pse sur lequel le secteur privé a eu à travailler dans la phase 1. La deuxième phase montre que le secteur privé sera au défi en ce qui concerne un certain nombre de projets. Nous sommes prêts à accompagner le PSE dans cette phase 2. Nous avons envisagé, au retour au Sénégal, de tenir une rencontre pour passer en revue les projets. Il s’agira de déterminer les projets dans lesquels le financement du secteur privé est attendu à 100% ou des projets sur lesquels il s’agira de partenariat public privé (PPP). S’y ajoute que les réformes annoncées nous intéressent. Il s’agit de voir dans quelle mesure on pourra accélérer un certain nombre de textes en ce qui concerne le PPP. Nous aurons à déterminer avec le président de la République les parts qui devront être dévolues au secteur privé national dans tous les projets. Cette place du secteur privé déterminera que nous puissions agir avec le secteur privé international, des partenaires étrangers. Le Sénégal est un pays ouvert. C’est un défi. Il faudra donc que nous assurions la réponse la plus appropriée pour les 5 années à venir

BABACAR NGOM DU CLUB DES INVESTISSEURS SENEGALAIS (CIS) « 1200 milliards de francs CFA d’investissements privés nationaux sur 5 ans »

Au cours du forum, Babacar Ngom a annoncé que le secteur privé national va investir pour au moins 1200 milliards de francs CFA sur une période de 5 ans. Il a fait cette annonce devant le chef de l’Etat Macky Sall. « Ce seront des investissements individuels ou collectifs avec les membres du Club, et en jointventure avec des privés étrangers », a précisé Babacar Ngom qui a conduit à Paris une importante délégation du CIS. Il a lancé en outre un appel en direction des investisseurs étrangers pour co-investir et monter des joint-ventures avec des partenaires sénégalais, dans un esprit gagnant-gagnant

IBRAHIMA BALDE (ENVOYE SPECIAL A PARIS)