Le renforcement des relations économiques entre le Sénégal et l’Égypte a franchi une nouvelle étape à l’occasion du Forum sur l’investissement et le commerce organisé par Afreximbank, en partenariat avec le Groupe des Ambassadeurs Africains accrédités au Caire. Ce rendez-vous, qui s’est tenu du 14 au 16 avril 2025 dans la capitale égyptienne, a vu la participation active du Directeur général de l’APIX-S.A., M. Bakary Séga Bathily, sur invitation de l’Ambassadeur d’Égypte au Sénégal. Cette première édition, appelée à devenir un événement biennal, a été l’occasion de présenter les grandes ambitions économiques du Sénégal, à travers les projets structurants de la Vision « Sénégal 2050 » et les réformes engagées pour améliorer l’environnement des affaires.
Durant un panel de haut niveau, le Directeur général de l’APIX a mis en avant le rôle clé du guichet unique de l’Agence dans l’accompagnement des investisseurs, ainsi que les opportunités qu’offrent les zones agroindustrielles (Agropoles) et les corridors commerciaux. Ces projets structurants, soutenus par des institutions financières panafricaines telles qu’Afreximbank, s’inscrivent dans une stratégie de transformation économique fondée sur la coopération Sud-Sud. En marge du forum, M. Bathily a également rencontré Mme Amani Kanayo, Vice-Présidente exécutive d’Afreximbank, pour discuter de la mobilisation de financements destinés à la phase préparatoire des projets structurants du Sénégal. Mme Kanayo a d’ailleurs confirmé sa participation au prochain Forum Invest in Senegal, prévu les 7 et 8 octobre 2025 à Dakar.
Des rencontres stratégiques ont également eu lieu avec de grands groupes égyptiens, notamment Elsewedy Electric, METCO Contracting, le groupe Hassan Allam et la SCZone (Autorité du Canal de Suez), tous manifestant un intérêt pour une implication concrète dans les projets sénégalais. Plusieurs de ces acteurs ont soutenu l’idée de l’organisation d’un Forum économique bilatéral Sénégal-Égypte dans un avenir proche, afin de donner plus de consistance aux relations commerciales entre les deux pays.
Sur le plan institutionnel, la Chambre de Commerce, d’Industrie et d’Agriculture de Dakar (CCIAD), représentée par son Secrétaire général, a multiplié les échanges avec ses homologues égyptiens, dont la Fédération des Chambres de Commerce d’Égypte et le Conseil des affaires Égypte-Sénégal. Ces discussions ont permis d’amorcer une nouvelle dynamique de coopération dans les secteurs du commerce, de l’agriculture et des services.
Sur le plan budgétaire, l’analyse des finances publiques des deux pays permet de mieux comprendre les contextes dans lesquels ces initiatives s’inscrivent. Le budget du Sénégal pour l’année 2024 a été fixé à 7 003,6 milliards de FCFA, en hausse de 20 % par rapport à l’année précédente. Les recettes fiscales s’élèvent à 4 915,2 milliards, tandis que les dépenses sont estimées à 5 755,4 milliards, générant un déficit de 840,2 milliards de FCFA, soit 3,9 % du PIB. Toutefois, seulement 953 milliards sont destinés à l’investissement, contre 1 442 milliards pour les dépenses de personnel, ce qui révèle un déséquilibre qui pourrait limiter la portée des projets à fort impact économique.
Du côté égyptien, le budget approuvé pour l’exercice 2024/2025 atteint 3 900 milliards de livres égyptiennes, soit environ 260 milliards de dollars. Il enregistre un déficit global de 1 200 milliards de livres, mais prévoit un excédent primaire de 591,4 milliards, équivalant à 3,5 % du PIB. L’Égypte affiche par ailleurs une volonté de réduire sa dette publique, qui devrait passer de 92 % du PIB en 2024 à 82,9 % en 2026. Une part importante de son budget est allouée aux subventions sociales, représentant 732,6 milliards de livres, notamment pour les produits alimentaires, l’énergie et les services de base.
Cette comparaison budgétaire met en lumière deux approches complémentaires du développement économique. Le Sénégal mise sur des réformes structurelles et des investissements dans des projets de transformation, malgré une pression sur ses marges budgétaires. L’Égypte, de son côté, s’appuie sur un budget plus important et une politique de soutien social affirmée, tout en engageant des efforts pour stabiliser sa dette. Le forum du Caire a ainsi offert une plateforme stratégique pour aligner les ambitions des deux pays et renforcer leurs complémentarités économiques.
À travers cet événement, le Sénégal a démontré sa volonté d’attirer de nouveaux partenaires, de partager ses priorités de développement et de jouer un rôle moteur dans la coopération intra-africaine. Les échanges entamés avec les opérateurs égyptiens posent les bases d’un partenariat renforcé, dans un contexte continental marqué par le renforcement de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf) et le besoin accru de financements innovants pour soutenir la croissance inclusive.Zaynab SANGARÈ