Le Sénégal traverse une période de turbulences économiques, marquée par un endettement national atteint des sommets inédits, frôlant presque les 100% du produit intérieur brut (PIB). Au même moment, l’Uemoa annonce une levée de fonds de presque 250 milliards entre Avril et juin. Cependant, selon le Fonds monétaire international (FMI), cette dette reste encore «viable» malgré sa croissance rapide. Une analyse détaillée des chiffres officiels et des derniers rapports économiques révèle un tableau contrasté où les défis économiques ne manquent pas, mais où les mécanismes de gestion de la dette et la capacité de l’État à honorer ses engagements financiers offrent un certain réconfort.
Le 18 mars 2025, à l’occasion d’une mission de révision du programme économique du Sénégal, Edward Gemayel, chef de mission du FMI, a exprimé son soutien à l’État sénégalais en dépit du niveau élevé de la dette publique. Selon les données de la Cour des comptes, la dette publique s’élèverait à 99,67 % du PIB à la fin de l’année 2023, un bond significatif par rapport aux 73,6 % observés sous l’ancien régime. Ces chiffres révèlent une augmentation de l’endettement public qui inquiète les analystes, mais selon Gemayel, la dette reste «viable», car le gouvernement sénégalais est actuellement capable de faire face à ses obligations.
La question de la viabilité de la dette est d’autant plus cruciale que le rapport de la Cour des comptes publié en février 2024 a soulevé des préoccupations quant à l’exactitude des chiffres concernant la dette et le déficit public entre 2019 et 2023. Le gouvernement a reconnu des «données erronées» publiées dans cette période et a dû faire face à un regain de critiques concernant la gestion des finances publiques sous la présidence de Macky Sall.
Cette situation a conduit à un dialogue approfondi avec les institutions internationales, en particulier le FMI. Lors de sa visite à Dakar, Gemayel a fait savoir que les autorités sénégalaises sont en train de travailler sur une série de mesures correctrices, en réponse aux lacunes identifiées dans le rapport de la Cour des comptes. Ce dialogue vise à garantir non seulement la transparence des finances publiques, mais aussi à rassurer les investisseurs quant à la solidité de l’économie sénégalaise.
Le Sénégal se trouve dans une position délicate que l’endettement atteint des niveaux préoccupants, mais la capacité de l’État à gérer cette dette demeure relativement solide. Selon les déclarations de Gemayel, bien que le ratio dette/PIB approche de 100 %, la situation reste gérable, à condition que les autorités poursuivent leurs efforts de transparence et d’ajustement fiscal. Le FMI soutient également que les autorités sénégalaises ont exprimé leur volonté d’obtenir une dérogation concernant certaines des normes budgétaires fixées par l’organisation. Cette demande de dérogation est en partie motivée par la volonté du gouvernement de concilier les exigences du FMI et les priorités économiques et sociales du Sénégal, telles que définies dans l’agenda Sénégal 2050.
Le programme du FMI, en cours de négociation, devrait refléter ces priorités, et Gemayel a déjà évoqué la nécessité d’adopter des mesures qui permettent de maintenir une trajectoire de croissance durable tout en ajustant la gestion de la dette publique.
Les investisseurs semblent, selon le FMI, «très rassurés» par les efforts de transparence du gouvernement sénégalais. Cette attitude proactive dans la gestion de la dette et la correction des erreurs passées est perçue positivement sur les marchés internationaux. Cependant, la situation reste tendue, et une question demeure à savoir comment le Sénégal va-t-il réussir à concilier ses ambitions de développement et la gestion d’une dette qui se rapproche de seuils critiques ?
Les débats autour de l’endettement du Sénégal vont sans doute se poursuivre, mais le soutien du FMI et des investisseurs montre qu’une voie est encore ouverte, bien que semée d’embûches. La capacité de l’État à honorer ses engagements, couplée à une gestion rigoureuse et à des réformes fiscales, sera déterminante dans la stabilité économique du pays dans les années à venir.
En dépit des inquiétudes légitimes soulevées par la croissance rapide de la dette publique, le Sénégal bénéficie encore d’une certaine confiance de la part des institutions financières internationales. Néanmoins, la gestion de cette dette sera un exercice délicat, qui nécessitera des ajustements structurels et une vigilance constante. Le Sénégal, dans son parcours vers l’émergence en 2050, devra trouver un équilibre entre développement économique et viabilité financière, sous le regard attentif du FMI et des investisseurs étrangers. Zaynab SANGARÈ