En France, la conférence générale du travail (CGT), Sud et la fédération syndicale unitaire (FSU) révèlent que des cadres de l’administration animent des formations payantes dispensées par un organisme privé. Le but de ses formations : indiquer aux employeurs les façons de parer aux actions de l’inspection du travail… La réaction des syndicalistes qui ont découvert l’affaire.
C’est ce qu’on appelle jouer contre son camp, voire contre ses propres collègues ou subordonnés. Les syndicats CGT, Sud et FSU du ministère du Travail ont révélé ce jeudi que des cadres de l’administration participaient à des formations payantes (845 euros l’inscription) dispensées par un organisme privé… à destination des employeurs. Des formations ayant notamment pour objectif, selon la description du stage, de « se défendre en cas de contentieux ou de procès-verbal dressé par l’inspection du travail ».
« Le Ministère du Travail forme les employeurs contre l’action de ses agents et les réclamations des salarié·es. (…) », dénoncent les organisations syndicales dans leur communiqué commun. Celles-ci demandent : « Ce scandale doit cesser immédiatement ! »
L’administration, de mèche avec les employeurs ?
« Nous sommes tombés sur cette annonce de formation par hasard, en lisant une publication de la société Lamy-Liaisons qui les organise », raconte Simon Picou, de la CGT SNTEFP. « En creusant, on s’est aperçu que cette formation qu’animait une responsable d’Unité de contrôle pour le compte de la DRIEETS Île-de-France, n’était pas la seule. D’autres de la sorte avaient été dispensées par d’autres agents. Ce qui nous effraie, c’est que le directeur régional, que nous avons interpellé, nous réponde qu’il ne voyait pas de problème. Le seul souci, selon lui, est l’intitulé de la formation, qu’il a demandé à la société organisatrice de modifier. »
Les attendus de cette formation ne vont effectivement pas par quatre chemins : « Contrôler les temps de travail et de repos des collaborateurs, pour éviter les sanctions et prouver le nombre d’heures effectuées… voilà un véritable casse-tête ! (…) Dès lors quels dispositifs mettre en place ? Quelles précautions prendre ? Comment se défendre en cas de contentieux ou de procès-verbal dressé par l’inspection du travail ».
« Que des avocats dispensent à leurs clients employeurs une telle formation pour éviter les contrôles de l’inspection du travail, c’est logique, reprend Simon Picou. Mais là, il s’agit d’un agent du ministère du travail. L’image renvoyée est celle d’une administration qui se range au côté des employeurs. Il y a un vrai problème d’impartialité. Imagine-t-on des policiers expliquer les recours ou les astuces pour faire sauter des contraventions à des chauffards ? Ou des agents de l’administration fiscale expliquer à des employeurs comment éviter les contrôles ? » Sollicité, le ministère du Travail n’a pas donné suite à nos questions.