La situation actuelle du pays est caractérisée par une certaine angoisse et des craintes des populations et des investisseurs sur l’avenir immédiat du Sénégal dans un contexte où les contestations sur le processus pré-électoral font rage.
Dans sa déclaration en date du 9 octobre 2018, le Forum Civil avait attiré l’attention de l’opinion nationale et internationale sur le profond désaccord de la classe politique sur les règles du jeu électoral notamment la loi instituant le parrainage, le maintien au ministère de l’Intérieur chargé d’organiser les élections, d’une personne présumée partisane par une frange importante des parties prenantes et qui est de surcroit membre du directoire du parti et de la coalition au pouvoir.
De l’indépendance du Sénégal à aujourd’hui, les sollicitations répétées des Juridictions à des fins de résolution de conflits entre politiques, ont fini d’éroder les bases de la relation de confiance entre l’Etat et les citoyens. De plus, la perception d’une forme de sélectivité dans le traitement de plusieurs dossiers judiciaires conforte l’opinion dans le sentiment d’une instrumentalisation de la Justice.
La récente sortie du Président de l’Union des Magistrats Sénégalais (UMS) sur la présence et le rôle actif de Monsieur le Président de la République au sein du Conseil Supérieur de la Magistrature (CSM) ne fait que conforter la thèse d’une magistrature sous tutelle de l’Exécutif annihilant le principe sacro-saint de l’indépendance de la Justice. La démocratie et l’Etat de droit ne sauraient fonctionner de cette manière.
Le Forum Civil rappelle que le Gouvernement doit instaurer en débat les questions sur lesquelles portent les projets de réformes, en tenant compte du caractère obsolescent du système actuel de gouvernance publique et d’éviter d’enfermer les réformes institutionnelles dans la temporalité d’un mandat et de mettre les citoyens dans une position inconfortable au moment du choix.
Ainsi la loi sur le parrainage a été adoptée sans débat occultant ainsi un des fondamentaux d’une démocratie véritable à savoir le dialogue, ce qui a engendré cette situation de contestation, menaçant la paix et la stabilité sociale du Sénégal.
Le parrainage étant institué par une loi, le Forum Civil constate cependant pour le déplorer que le processus de vérification des parrainages a été faussé dès le départ par un déficit de transparence et de fiabilité, car les données de base devant servir de référentiel de comparaison n’ont pas été transmises aux candidats à la candidature. Il y a eu aussi une réelle rupture du principe d’égalité des candidats à la candidature devant les règles du jeu électoral.
De plus les candidats à la candidature n’avaient aucun moyen de savoir si les parrainages transmis au Conseil Constitutionnel ont fait l’objet de vérification avec les mêmes données de base. Finalement le processus électoral est bâti dans le moule de la défiance et non de la confiance des acteurs, condition substantielle aux bonnes pratiques internationalement reconnues en matière électorale.
Les manquements constatés et tardivement présentés aux citoyens par les Observateurs de la société civile, relatifs à « l’absence de référentiel précis disponible pour tous les candidats pour éviter les erreurs matérielles, l’absence d’informations sur le logiciel de traitement des données utilisées (quel logiciel, comment a-t-il été paramétré, etc.) « constituent des vices substantiels au processus de vérification des parrainages et ont causés des rejets de listes de parrainage de candidats à la candidature.
La paix sociale est menacée, la stabilité de la sous-région est très fragile et les vulnérabilités du pays avérées. Au vu de cette situation, le Forum Civil réitère la demande formulée dans sa déclaration du 9 octobre 2018 consistant, pour le Président de la République, garant constitutionnel de l’unité et de la cohésion nationale, de désigner une personnalité ou un organe consensuel et indépendant pour la poursuite de l’organisation de l’élection présidentielle.
En matière judiciaire, le sentiment le mieux partagé aujourd’hui est celui d’une justice au service de l’exécutif, une instrumentalisation à outrance de la justice à des fins de politique politicienne
Relativement à l’affaire du Maire de Dakar, le Forum civil constate que son mode de traitement semble sortir du principe de redevabilité au cœur de toute politique de bonne gouvernance, à laquelle devraient être soumis tous les détenteurs de charges publiques sans discrimination, pour emprunter les voies de l’élimination par voie judiciaire d’un candidat à la candidature à la présidentielle de 2019.
Le Forum Civil invite la Cour suprême et le Conseil Constitutionnel à respecter les droits de Monsieur SALL sur le caractère suspensif en matière de Rabat-d’arrêt tels que prévus par les articles 37, 38, 39, 49, 51 et 52 de la loi organique n°2017-09 du 17 janvier 2017 relative à la Cour suprême.
Depuis quelques temps, nous constatons un certain désordre du Droit provoqué par ceux qui sont chargés de le protéger et de le mettre en œuvre. C’est pourquoi le Forum Civil attire l’attention du Conseil Constitutionnel sur les risques de basculement du pays dans une situation d’instabilité sans précèdent.
La section sénégalaise de Transparency International exhorte tous nos concitoyens à aller retirer leur carte d’électeur afin de pouvoir accomplir librement leur droit de vote le jour du scrutin. Le Forum Civil invite les forces de sécurité et de défense à la retenue en garantissant la sécurité aux citoyens afin de permettre à notre pays d’avoir un scrutin libre, apaisé et transparent mais aussi appelle les acteurs politiques, toutes obédiences confondues, au sens de la responsabilité et à la sauvegarde de l’intérêt général pour éviter des contentieux et des violences pré et post électoraux préjudiciables à la stabilité du pays.
Dakar le 07-01-2019