Au Sénégal, les services douaniers intensifient leur riposte contre les réseaux de criminalité économique qui gangrènent le pays. Ces derniers jours, les unités spécialisées de la Douane ont mené une série d’opérations coup de poing qui mettent à nu l’ampleur du trafic de faux billets et de marchandises prohibées. À Dakar comme dans les régions, les saisies se multiplient, révélant des circuits organisés et souvent insoupçonnés, opérant sous couvert d’anonymat dans les zones urbaines, semi-rurales et frontalières.
Dans la nuit du 17 au 18 avril 2025, aux environs de deux heures du matin, c’est à Ouest Foire que la Brigade mobile des Douanes de Pikine, relevant de la Direction régionale Ouest, a mis la main sur un stock de billets noirs estimé à trois milliards sept cents millions de francs CFA. L’opération, menée avec précision, a conduit à l’interpellation de trois individus sénégalais, dont une femme. Selon des sources internes, il ne s’agirait pas d’un simple cas isolé, mais bien d’un maillon dans une chaîne plus vaste. Quelques jours avant, la même brigade avait déjà intercepté un autre lot de billets noirs d’une valeur de sept cent vingt-trois millions de francs CFA, confirmant la récurrence de ces tentatives de blanchiment.
La région de Kaolack n’est pas en reste. À Kahone, dans une auberge en périphérie de la ville, les agents de la Brigade mobile du Pont Serigne Bassirou Mbacké ont démantelé un autre réseau. Ils y ont arrêté un jeune homme se présentant comme étudiant, porteur de plus de vingt-et-un mille coupures de faux billets verts et noirs. Montant total de plus de trois milliards de francs CFA. La fouille minutieuse et l’analyse des documents saisis ont poussé les enquêteurs à élargir leurs investigations. Elles ont mené, quelques heures plus tard, à la Cité Aliou Sow à Dakar, où une autre cache a été découverte. Deux millions de francs CFA en billets noirs ont été saisis, et trois autres suspects sénégalais ont été arrêtés. Tous ces coups de filet sont le fruit d’un long travail de surveillance, de recoupement d’informations et de filatures discrètes, révélant un système structuré et mobile, bien renseigné sur les failles du maillage sécuritaire mais visiblement pris de court par la nouvelle stratégie douanière.
Parallèlement aux affaires de faux monnayage, une opération distincte a permis de saisir un important lot de faux médicaments. Cette fois, c’est la Brigade mobile de Richard-Toll, sous la houlette de la Direction régionale des Douanes du Nord, qui a mis en échec une tentative de trafic pharmaceutique. Sur la route reliant Ross-Béthio à Keur Momar Sarr, les agents ont intercepté un véhicule suspect après une course-poursuite tendue. À bord, 45 cartons de médicaments vétérinaires et 10 cartons de médicaments destinés à un usage humain. La contrevaleur du lot est estimée à quarante-six millions de francs CFA. L’enquête reste ouverte, mais les premiers éléments laissent penser que les produits devaient être redistribués dans des circuits parallèles, en dehors des canaux officiels de santé.
Face à la recrudescence de ces formes de criminalité économique, la Direction générale des Douanes affirme renforcer ses dispositifs de veille, d’analyse de risque et de renseignement. L’enjeu dépasse la simple saisie de marchandises illégales : il s’agit de préserver la stabilité économique, la santé publique et la confiance dans la monnaie nationale. À travers ces opérations, c’est une guerre silencieuse que livrent les agents de terrain, souvent au péril de leur sécurité, pour désorganiser des réseaux dont l’existence même menace les fondements de l’économie sénégalaise. Zaynab SANGARÈ