Le plus grand fonds souverain au monde, qui possède près de 1.200 milliards d’euros d’actifs sous gestion, s’engage à n’avoir dans son portefeuille que des entreprises aux activités décarbonées en 2050. Le fonds s’appuie déjà sur des critères environnementaux qui lui imposent de ne pas investir dans des entreprises qui provoquent des dégâts écologiques. Ce nouveau virage lui est dicté par son Parlement. Reste à savoir s’il sera tenable financièrement.
Nourri aux recettes des énergies fossiles, le fonds souverain norvégien tourne progressivement le dos aux activités carbonées. Le plus gros fonds souverain de la planète compte exiger des 9.000 entreprises dans lesquelles il a investi qu’elles atteignent zéro émission nette de carbone d’ici à 2050.
« Nous fixons un objectif de zéro émission nette d’ici 2050 au plus tard pour toutes les entreprises », a déclaré mardi Carine Smith Ihenacho, directrice de la gouvernance et de la conformité du fonds à l’occasion de la présentation du nouveau plan climatique de l’institution. « Nous nous impliquerons auprès des entreprises pour atteindre cet objectif en fixant des objectifs préliminaires crédibles, et en mettant en place des plans pour réduire leurs émissions directes et indirectes de gaz à effet de serre », a-t-elle précisé dans un communiqué.
Selon la commission d’experts de l’ONU sur le climat (Giec), atteindre la neutralité carbone en 2050 est une condition absolument nécessaire pour la limitation du réchauffement climatique à 1,5°C comme le prévoit l’Accord de Paris.
1.200 milliards d’euros d’actifs sous gestion
Pour le fonds norvégien, cette transition vers le zéro carbone ressemble à une révolution copernicienne. Immensément riche avec ses 12.000 milliards de couronnes (près de 1.200 milliards d’euros) sous gestion, il possède des parts de plus de 9.000 entreprises dans 70 pays. Mais seulement 10% d’entre elles ont établi un objectif de neutralité carbone.
Conscient de l’ampleur de la tâche, le Government Pension Fund Global prévoit dans un premier temps d’accompagner les entreprises en question afin qu’elles verdissent leurs activités. Et si les entreprises ne prennent pas le virage vers la neutralité carbone, alors, « en ultime recours », le fonds se désengagera de leur capital, a détaillé Mme Ihenacho lors d’une conférence de presse.
L’État norvégien impose déjà des règles éthiques à son fonds souverain, lui interdisant tout investissement dans les sociétés coupables de dégâts environnementaux ou climatiques graves et dans le charbon. Pour l’heure, le fonds a déjà cédé ses parts au capital de quatre entreprises jugées trop émettrices de gaz à effet de serre. A travers ce plan climatique, le fonds se conforme en fait à une décision prise cette année par le Parlement norvégien qui a fixé cet objectif de zéro émission nette en 2050.
La faisabilité et la rentabilité du plan climatique en question
Outre sa faisabilité se pose la question de la viabilité financière d’une telle transition climatique. « La durabilité est une condition pour de bons rendement à l’avenir », a estimé Øystein Børsum, le vice-gouverneur de la Banque de Norvège qui chapeaute le fonds.
Au premier semestre, le fonds qui possède 1,3% de l’ensemble de la capitalisation boursière mondiale, a perdu 163 milliards d’euros à cause de pertes en Bourse, notamment dans les valeurs technologiques. Ce déficit sera comblé par les recettes colossales qu’engrange l’État norvégien grâce à l’explosion de la demande européenne en gaz et en pétrole, avec un excédent commercial de 20 milliards d’euros sur le seul mois d’août.